lundi 25 avril 2011

La palette de couleurs

Merveilleux outil, la palette de couleur est cette plaque percée d’un trou pour le pouce, sur laquelle le peintre dispose et mêle ses couleurs. De façon abstraite, on parle de la palette de couleur d’un artiste pour désigner l’ensemble des couleurs qu’il utilise ordinairement.

La palette sur laquelle je travaille depuis plus de cinquante ans est toujours lisse comme une neuve. Ce qui avait d’ailleurs étonné un journaliste venu m’interviewer dans mon atelier.

Comment faites-vous pour garder votre palette si propre ?

Je la nettoie. C’est tout !

Il existe bien des palettes jetables, sortes de tablettes en papier ciré dont on peut détacher les feuilles une à une après usage. Mais moi, je préfère ma palette en bois. J’aurais mauvaise grâce à délaisser cette alliée, témoin de toutes mes recherches. Et Dieu sait si elle en a vues de toutes les couleurs !

En fait, la palette c’est le support de l’artiste sur lequel il mélange les pigments jusqu’à l’obtention de la couleur désirée. Un dialogue sensible s’établit entre elle et lui. Avec son œil il évalue la justesse du ton alors qu’avec sa spatule il jauge la densité de la pâte. Si besoin est de la diluer, il ajoute un peu de médium solvant placé dans le godet accroché à la palette. Bref, la palette est un mini laboratoire de recherche.

Dans sa signification abstraite la palette désigne le choix des couleurs généralement utilisées par l’artiste. Elle devient alors grande révélatrice de sa personnalité et de son vécu. On n’a qu’à penser aux couleurs claires d’un Renoir heureux, aux tristes compositions d’un Schiele tourmenté, aux coloris éclatés d’un Pellan joyeux, pour deviner l’état d’esprit qui les habitait.

La palette d’un artiste évolue au fil des ans. Picasso avant sa démarche cubiste aura ses périodes successives de bleu et de rose. Dans la première, il dépeint des scènes graves. Dans la seconde, il exprime sensualité et tendresse. Borduas, coloriste au début, devient sombre à la fin. Il ne peint alors que de grandes taches noires sur fond blanc, tristement surnommées par les critiques : « peaux de vaches ».

Révélateur de l’âme, la palette ne peut mentir. Elle brosse à sa manière la vie de l’artiste. Si je regarde l’évolution de ma propre palette, je vois que mes couleurs timides du début s’affranchissent progressivement. Dans mes derniers tableaux, dédiés à mes petits-enfants, les fleurs abondent. Signe manifeste de mon bonheur.

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